Collaborateurs
Coordonnateurs régionaux
JANKOWSKI Roger
CHU de Nancy (54)
Rédacteurs
DOLIVET Gilles
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
GEOFFROIS Lionnel
Institut de Cancérologie de Lorraine (54)
GRAFF Pierre
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
HENROT Philippe
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
KACHA Sophie
CHR de Metz-Thionville (57)
KAMINSKY Marie-Christine
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
MASTRONICOLA Romina
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
OLDRINI Sophie
Institut de cancérologie de Lorraine (54)
RUMEAU Cécile
CHU de Nancy (54)
SALF Eric
HIA Legouest (57)
STRINGINI Robert
CHR de Metz-Thionville (57)
VIGNAUD Jean-Michel
CHU de Nancy (54)
Ce référentiel, dont l'utilisation s'effectue sur le fondement des principes déontologiques d'exercice personnel de la médecine, a été élaboré par un groupe de travail pluridisciplinaire de professionnels du réseau régional de cancérologie de Lorraine (ONCOLOR), en tenant compte des recommandations nationales, et conformément aux données acquises de la science au 9 avril 2014.
- Ce référentiel concerne les cancers des cavités nasales et des sinus de la face.
- Ces cancers présentent certaines spécificités :
- l'endoscopie et l'imagerie double (IRM et TDM) sont les examens clés du diagnostic.
- du point de vue histologique, il existe une grande variété de formes anatomo-pathologiques.
- les cancers des cavités nasales et des sinus répondent aux critères définissant les maladies rares (définition de l'INCa = moins de 3/100 000 habitants par classe histologique). En France, il s’agit d’une tumeur rare, et chaque cas doit faire l’objet d’une déclaration au registre français des tumeurs rares (REFCOR). Les dossiers des patients atteints de tumeurs nasopharyngées doivent faire l’objet d’une présentation systématique en RCP de recours (RCP commune CHU-ICL) : coordonnées des correspondants REFCOR en Lorraine :
- Dr B. Toussaint : 03 83 85 54 14
- Dr MC. Kaminsky : 03 83 59 83 31
- La chirurgie est la solution thérapeutique de 1ère intention ; la voie endoscopique doit être privilégiées par rapport aux voies classiques externes ou mixtes ; les prothèses-épithèses peuvent s'envisager.
- Selon le contexte, il faut savoir rechercher une maladie professionnelle.
- Plusieurs cas particuliers sont détaillés dans ce référentiel :
- carcinome nasosinusien
- adénocarcinome de la fente olfactive de l'éthmoïde
- neuroblastome olfactif (esthésioneuroblastome ou esthésioneurocytome).
- Les carcinomes adénoïdes kystiques ou cylindromes sont abordés dans le référentiel Glandes salivaires. Les lymphomes et rhabdomyosarcomes sont abordés dans le référentiel correspondant.
- Examens ORL, ganglionnaire et général.
- Examen ophtalmologique avec étude de l'acuité visuelle en cas de suspicion d'extension orbitaire
- Examen neurologique (paires crâniennes)
- Nasofibroscopie pour le dépistage.
- Endoscopes rigides pour le guidage-biopsie sous AL ou AG.
- Biopsies larges en zone charnue (abord chirurgical possible si biopsie endonasale non contributive) : 1 fragment fixé (1 fragment frais si le transfert peut être rapide à l'anatomopathologiste).
- A faire après l'imagerie si possible.
- Données socio-démographiques
- Etat général OMS
- Poids habituel et perte de poids
- Antécédents médico-chirurgicaux
- Examen clinique et ORL
- Données endoscopiques avant biopsie
- TDM crânio-faciale et cervico-thoracique injectées
- IRM des sinus + crânio-encéphalique (T1 + T2 + gadolinium) (coupes axiales et coronales)
- Compte-rendu anatomo-pathologique
- Compte-rendu opératoire (si malade déjà opéré).
- Le diagnostic de malignité repose sur l'examen anatomo-pathologique après biopsie de la tumeur.
- En cas de doute histologique, un second avis anatomo-pathologique doit être proposé
- Critères indispensables à la prise en charge :
- type histologique
- différenciation
- grading histopronostique.
- Plusieurs critères sont indispensables à la décision thérapeutique adjuvante. Ils concernent :
-
Tumeur T
- différenciation
- taille tumorale, emboles lymphatiques, infiltration péri-nerveuse, siège d'implantation
- infiltration musculaire, osseuse
- limites d'exérèse (R0 ou R1)
- recoupes (orientées si possible en peropératoire)
- type histologique
- Ganglions N (si indication de curage)
-
Tumeur T
- Classification pour le sinus maxillaire.
Tx | Inclassable |
T0 | Pas de signe de tumeur primitive |
Tis | Carcinome non invasif (carcinome in situ) |
T1 | Tumeur limitée à la muqueuse du sinus maxillaire (antre) sans atteinte osseuse |
T2 | Tumeur avec ostéolyse de l'infrastructure, y compris le palais dur et/ou la région du méat médian excepté la paroi osseuse postérieure du sinus maxillaire et les apophyses ptérygoïdes |
T3 | Paroi osseuse postérieure du sinus maxillaire, tissu sous-cutané, plancher et/ou paroi interne de l'orbite, fosse ptérygoïde, sinus ethmoïdal |
T4a | tumeur envahissant l'une des structures suivantes : cavité orbitaire antérieure, peau de la joue, apophyses ptérygoïdes, fosse infra-temporale, lame criblée, sinus sphénoïdal ou sinus frontal |
T4b | tumeur envahissant l'une des structures suivantes : toit de l'orbite, dure-mère, cerveau, étage moyen de la base du crâne, nerfs crâniens autres que la division maxillaire du nerf trijumeau (V2), nasopharynx ou clivus. |
- Classification pour les fosses nasales et le sinus éthmoïdal *
* Il semble important de distinguer les cancers de la fente olfactive et ceux du labyrinthe ethmoïdal, bien que ce paramètre n'apparaisse pas dans la classification UICC 2009.
Tx | Inclassable |
T0 | Pas de signe de tumeur primitive |
Tis | Carcinome non invasif (carcinome in situ) |
T1 | Tumeur limitée à une sous-localisation de la fosse nasale ou du sinus ethmoïdal avec ou sans atteinte osseuse |
T2 | Tumeur s'étendant à 2 sous-localisations ou dans une seule localisation ou envahissant une localisation voisine à l'intérieur du complexe naso-ethmoïdal avec ou sans atteinte osseuse |
T3 | Tumeur envahissant la paroi interne ou le plancher de l'orbite, le sinus maxillaire, le palais ou la lame criblée |
T4a | tumeur s'étendant à l'une des structures suivantes : orbite antérieure, peau du nez ou de la joue, extension minime à l'étage antérieur de la base du crâne, apophyses ptérygoïdes, sinus sphénoïdal ou frontal |
T4b | tumeur envahissant l'une des structures suivantes : toit de l'orbite, dure-mère, le cerveau, étage moyen de la base du crâne, les nerfs crâniens autres que V2, le nasopharynx, le clivus. |
N0 | Pas de signe d'atteinte des ganglions lymphatiques régionaux |
N1 | Métastase dans un seul ganglion lymphatique homolatéral ≤ 3 cm dans sa plus grande dimension |
N2 | Métastases telles que : |
N2a | métastase dans un seul ganglion lymphatique homolatéral >3 cm mais ≤ 6 cm |
N2b | métastases homolatérales multiples toutes ≤ 6 cm |
N2c | métastases bilatérales ou controlatérales ≤ 6 cm |
N3 | Métastase dans un ganglion lymphatique >6 cm dans sa plus grande dimension |
- Par ordre décroissant, les tumeurs les plus fréquentes sont :
1 | ethmoïde | - adénocarcinome 50 % - carcinome 30 % - neuroblastome olfactif 2 à 5 % |
2 | sinus maxillaire | - carcinome épidermoïde 80 % des cas |
2 | fosse nasale | - carcinome épidermoïde 85 % - mélanome (rare) |
3 | sinus frontal, sphénoïdal | - exceptionnel |
- Le traitement de toutes les formes histologiques relève d'une décision en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).
- A l'exception des petites tumeurs T1, la chirurgie est toujours associée à une radiothérapie externe.
- La chirurgie précède habituellement la radiothérapie (radiothérapie postopératoire).
- Une chirurgie de rattrapage peut être discutée après réalisation d'une radiothérapie ± chimiothérapie initiale en cas de tumeur inopérable initialement.
- L'extension ganglionnaire est rare (environ 20 % des cas) et par conséquent la chirurgie ganglionnaire n'est pas systématique.
- La chirurgie ganglionnaire est recommandée en cas de N clinique, N suspect sur l'imagerie préopératoire et discutée pour certaines formes histologiques (neuroblastomes...) et certaines localisations.
- Les contre-indications absolues à la chirurgie sont rappelées dans l'arbre décisionnel
- La chirurgie d'exérèse peut être menée par voie endonasale, par voie trans-faciale ou par voie vestibulaire buccale
- La résection endoscopique crânio-ethmoïdale peut remplacer une chirurgie mixte, par voie externe, ORL + neurochirurgicale dans certaines situations.
- Consultation d’endocrinologie pour hypophysiogramme de référence avant irradiation de la base du crâne.
- Consultation d’ophtalmologie pour bilan de référence évaluant l’acuité visuelle et le champ visuel des 2 yeux.
- Soins dentaires
- Avant tout traitement, une remise en état dentaire est indispensable avec détartrage, soins et extractions de toutes les dents délabrées et mobiles (Cf. également référentiel sur les soins dentaires).
- En cas de radiothérapie externe, on ne conserve dans les champs que les dents parfaitement saines. Le patient devra s'astreindre à une fluoroprophylaxie quotidienne et non limitée dans le temps.
- Avant tout traitement, une remise en état dentaire est indispensable avec détartrage, soins et extractions de toutes les dents délabrées et mobiles (Cf. également référentiel sur les soins dentaires).
- La radiothérapie externe est le plus souvent associée aux autres modalités thérapeutiques :
- après chirurgie essentiellement
- concomitamment à une chimiothérapie
- en traitement des tumeurs localement avancées inopérables si l’histologie est en faveur d’une sensibilité à la chimiothérapie
- en traitement des tumeurs localement avancées inopérables si l’histologie est en faveur d’une sensibilité à la chimiothérapie
- La radiothérapie externe peut également être délivrée de façon exclusive :
- pour des tumeurs localement avancées en cas de contre-indication à une chirurgie et à une chimiothérapie
- en traitement palliatif à visée symptomatique (SPLIT-COURSE, hypofractionnement).
- La radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI) est recommandée car elle permet une couverture optimale des volumes cibles dans une région anatomique complexe (proximité de nombreux organes à risque dont les voies optiques). Elle utilise des rayonnements X de 4 à 6 MV.
- L'irradiation prophylactique (50 Gy) ganglionnaire cervicale n'est pas systématique chez les patients N0/N- (en dehors de certaines histologies à risque).
- Le délai entre la chirurgie et la radiothérapie doit être ≤ 6 semaines (pour les carcinomes épidermoïdes notamment) sauf complications incompatibles avec l’initiation de la radiothérapie. Compte tenu du temps de mise en œuvre des traitements de radiothérapie adjuvante, la coordination des équipes doit être optimisée pour favoriser le respect de ces délais.
- La RCMI sera délivrée en mode séquentiel selon un fractionnement et un étalement standard délivrant les doses suivantes :
-
En postopératoire (tumeurs opérables)
- Irradiation prophylactique sur le lit opératoire, les extensions tumorales microscopiques en base du crâne, la région rétropharyngée et ± les aires ganglionnaires N0 / N- / N+ R-
- 50 Gy / 25 fr / 5 semaines
- Compléments
- Un complément est souvent délivré sur le lit opératoire à l'exception des petites tumeurs (T1 T2) dont l'exérèse est complète avec une marge jugée satisfaisante : 10 à 16 Gy / 8 fr / 1,5 semaine
- N+ R+: 16 Gy / 8 fr / 1,5 semaine
- Irradiation prophylactique sur le lit opératoire, les extensions tumorales microscopiques en base du crâne, la région rétropharyngée et ± les aires ganglionnaires N0 / N- / N+ R-
-
Tumeur en place (tumeurs non opérables)
- T et N (sauf N0) : 70 Gy / 35 fr / 7 semaines
- N0 : 50 Gy / 25 fr / 5 semaines
-
En postopératoire (tumeurs opérables)
- L'étalement joue un rôle essentiel et doit être respecté. L'apparition d'une mucite ou d'une dysphagie ne doit pas faire arrêter le traitement sauf exception argumentée et impose une prise en charge nutritionnelle et symptomatique
- Facteurs pronostiques défavorables :
- l'interruption et l'allongement de la radiothérapie.
- retard de la réalisation de la RTE adjuvante
- Les indications de la chimiothérapie pour les carcinomes sont :
- concomitante à la radiothérapie :
- dans les tumeurs localement avancées pour lesquelles la chirurgie n'est pas retenue. Elle utilisera de préférence un protocole à base de sels de platine.
- en postopératoire (RCP) : radiochimiothérapie : uniquement pour les carcinomes épidermoïdes
- en cas de N+ R+ ; la décision doit être prise en tenant compte de l'état général du patient, du risque de complications et des contre-indications aux sels de platine
- en cas de marge +
- à base de cisplatine.
- concomitante à la radiothérapie :
-
La chimiothérapie palliative concerne la maladie métastatique, les récidives ou seconde localisation en territoire irradié inaccessibles à un traitement locorégional
- Une chimiothérapie première peut être envisagée dans certaines situations de tumeur localement avancée.
- Option : le cétuximab, anticorps monoclonal antirécepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR), peut être associé à la radiothérapie dans les tumeurs localement avancées pour lesquelles la chirurgie n'est pas retenue et en cas de contre-indication à la chimiothérapie.
- La récidive locale explique la majorité des échecs carcinologiques. La surveillance est donc dominée par l'examen clinique associé à l'imagerie.
- La surveillance est idéalement alternée conjointement par les chirurgiens ORL, oncologues médicaux et radiothérapeutes qui ont participé au bilan et au traitement de la maladie. Elle fait intervenir de nombreux soignants dans la rééducation et la prise en charge globale de ces patients.
- Les objectifs de la surveillance consistent :
- en la prise en charge des effets secondaires et des séquelles
- en un soutien psychologique
- à une aide au sevrage alcoolo-tabagique
- à la vérification de l’hygiène dentaire et de la compliance à la fluoroprophylaxie
- au dépistage des deuxièmes localisations ORL et au dépistage des récidives locorégionales
- à la recherche d’une autre localisation tumorale partageant les facteurs de risque alcoolo-tabagiques (essentiellement œsophage et poumon)
- à assurer un suivi nutritionnel (perte de poids, dénutrition, gastrostomie, SNG) en coordination avec une diététicienne.
- à une prise en charge de la douleur en coordination avec UTD.
- Ce tableau résume la surveillance à effectuer:
Examens | Rythme de surveillance |
---|---|
Examen clinique et endoscopique | A 3 mois puis tous les 6 mois pendant 2 ans puis 1 fois par an toute la vie |
Surveillance dentaire | Régulière : consultation bi-annuelle chez un dentiste pour un patient denté |
Scanner crânio-facial | A 3 mois de la fin des traitements (scanner de référence pour le suivi ultérieur) puis à réaliser au moindre doute avec l'IRM |
IRM crânio-facial | A 3 mois de la fin des traitements (IRM de référence pour le suivi ultérieur) 1 fois par an quelle que soit la tumeur |
Dosage de TSH | 1 fois par an si la thyroïde est dans les champs d’irradiation |